Il Fallait que je Vous le Dise est le témoignage d’un médecin et d’une patiente qui se sont rencontrés pour avoir tous deux vécu des avortements, chacun à sa manière.
L’IVG ou avortement est un droit en France, mais qui reste menacé. Dans de nombreux pays, il est dur, dangereux voire impossible d’y accéder, comme le racontait Esther lorsqu’elle est partie en reportage autour du monde.
Avorter, ça se passe comment, concrètement ?
Mais mettons que je doive y avoir accès, comment ça se passe, concrètement ?
Je ne parle pas que des démarches et du processus médical en lui-même. J’ai lu des bouquins, je suis vaguement renseignée ; au moins je sais où trouver les informations dont je pourrais avoir besoin.
Ce que j’ignore, c’est comment je pourrais me sentir, les émotions qui me traverseraient.
Ce dont je doute, c’est de ma capacité à accompagner une amie, une sœur, une collègue qui vivrait une IVG, et d’être en mesure d’imaginer ce qu’elle peut ressentir ; tout du moins de la comprendre.
D’abord parce que c’est évident : impossible de se projeter avec précision et d’anticiper des ressentis provoqués par une situation et un contexte jamais rencontrés.
Mais également parce que j’ai la sensation que nous manquons cruellement de témoignages qui parleraient de l’IVG « de l’intérieur ».
De comment on le ressent, qu’est-ce que ça fait lorsqu’on aspire notre utérus, qu’est-ce que ça fait de le faire et de procéder à une IVG en tant que médecin.
Que ressent-on lors d’un avortement ?
C’est de ce genre de contenus, de détails pratiques, dont j’ai peur de manquer cruellement si un jour je choisis d’avorter.
Oui, j’aurai certainement besoin de savoir comment m’habiller pour un avortement, parce que je n’ai pas envie de, en plus d’avoir à gérer une situation peut-être complexe, me sentir inconfortable et me foutre du sang partout.
C’est l’un de ces manques que vient combler à sa manière la BD d’Aude Mermilliod, Il Fallait que je Vous le Dise.
Il Fallait que je Vous le Dise, la BD d’Aude Mermilliod sur l’avortement
Aude Mermilliod a vécu un avortement. Elle a décidé d’écrire, pour raconter ce qu’elle a ressenti, les doutes qui l’ont traversée, la réalité physique de son expérience.
Puis elle a rencontré Martin Winckler, médecin généraliste, défenseur des droits des femmes, qui lui aussi témoigne à son tour dans sa BD.
Il y apporte un autre regard : celui d’un médecin qui a appris à pratiquer les IVG, qui a vu des femmes souffrir sous ses instruments, et construit sa pratique pour les soulager au maximum.
Les deux vécus, complémentaires, autour d’une même expérience aux mille facettes, dressent un tableau de ce à quoi peut ressembler un avortement. L’histoire est banale et crue, le trait parfois heurtant et doux à la fois.
J’ai eu le sentiment d’apprendre beaucoup en lisant cette BD, même alors que j’ai lu plusieurs ouvrages et parcouru des témoignages de médecins (principalement Martin Winckler, soyons honnêtes) comme de patientes.
Une BD sur l’avortement, du témoignage de la patiente à celui du médecin
Je suis heureuse qu’un tel contenu puisse exister, et j’aimerais qu’il permette aux femmes comme aux autres de se projeter, pour appréhender l’IVG à travers tout un tas de visions.
Peut-être que ce serait un début pour abolir l’expression « avortement de confort » qui me hérisse le poil autant qu’elle ne renvoie à rien de ce que je pourrais imaginer.
La BD d’Aude Mermilliod, et avec Martin Winckler, paraît ce 8 mai 2019 aux éditions Casterman. Tu peux d’ors et déjà la commander, et découvrir cette histoire touchante et brute, mais pas déprimante, loin de là.
http://www.madmoizelle.com/bd-avortement-aude-mermilliod-991798