À quelques mois des élections, le cd&v refuse de « continuer les travaux de manière constructive » sur l’IVG, comme le prévoit pourtant l’accord de gouvernement, et sabote le processus de vote du Parlement. Le message envoyé à la société civile est qu’une position idéologique indéfendable peut paralyser l’organe même de la démocratie belge.
Le cd&v l’a fait inscrire dans l’accord de gouvernement : il fallait réunir un groupe d’expert·es multidisciplinaire et indépendant, issu des 7 plus grandes universités du pays, toutes confessions confondues, afin de « dépassionner » le débat sur l’avortement. Le parti chrétien flamand s’engageait ensuite à discuter avec les autres partis de la majorité (tous favorables à une évolution de la loi) pour trouver un consensus sur la question. Le rapport a été présenté il y a un an au gouvernement : 35 expert·es ont dévoilé les conclusions d’un rapport unanime, qui rejoignent les directives de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les demandes du terrain, les législations en vigueur dans plusieurs pays européens… Les expert·es ont abordé par ailleurs dans le détail des questions qui tenaient à coeur au cd&v : tout un chapitre éthique abordant les questions d’autonomie, d’égalité, mais aussi de douleur, viabilité et statut du fœtus.
Depuis, le cd&v refuse tout débat autour de la question, malgré l’insistance et la bonne volonté des autres partis qui ont joué le jeu imposé par ce parti, minoritaire au sein de la Vivaldi. En témoigne la Commission Justice du mardi 20 février, où une proposition de loi reprenant scrupuleusement les recommandations des expert·es a été discutée… sans le cd&v, qui est ostensiblement sorti de la salle lorsque ce point de l’ordre du jour a été abordé.
La position du cd&v, suite à la publication de ce rapport unanime, est claire : il s’agit d’une position idéologique de parlementaires qui refusent d’écouter les scientifiques, la société civile et surtout les quelque 500 femmes hors-délai qui se rendent chaque année aux Pays-Bas pour pouvoir avorter. Tout parti, spécialement à quelques semaines des élections, a le droit de défendre ses propres idées, aussi intenables et infondées soient-elles. La question n’est d’ailleurs pas de pousser le cd&v à voter une nouvelle loi IVG, c’est même le contraire : même les partis de la majorité exhortent le cd&v à respecter ses positions et voter contre l’élargissement de la loi… mais de laisser le vote se faire. Car c’est bien là que le bât blesse : le cd&v, imperméable à tout bon sens, a usé en 2020 d’une stratégie de sabotage indigne d’une démocratie, en s’alliant à la NVA, au Vlaamse Belang ainsi qu’à quelques autres parlementaires. Ces 3 partis ont renvoyé de manière intempestive la proposition de texte de l’actuelle majorité au Conseil d’État, empêchant ainsi le texte de passer au vote (stratégie qui a agacé le Conseil d’État lui-même, au vu du dernier avis lapidaire rendu sur la demande des trois partis). C’est bien ce boycott nauséabond qui paralyse, encore aujourd’hui, la Vivaldi, et empêche toute avancée sur la question de l’IVG.
À quelques mois des élections, un tel constat est accablant : un parti peut aujourd’hui, en Belgique, prendre en otage tout un Parlement et un gouvernement sur base d’une position morale dépassée et d’un mépris évident des femmes et de leur santé. Qu’un ensemble de parlementaires impose un tel camouflet à la communauté scientifique est déjà aberrant ; qu’il menotte ensuite tout un organe démocratique est intolérable.
Nous exhortons aujourd’hui le cd&v, non pas à voter un texte contraire à ses idées, mais à respecter les principes démocratiques qui régissent le Parlement pour lequel il travaille et des électeur·ices qu’il représente. Nous l’enjoignons à écouter les conclusions des scientifiques qu’il a mandatés. Et surtout, nous demandons d’être rassuré·es, en tant que citoyen·nes belges et à quelques mois des élections, sur l’état de la démocratie de notre pays.
Va-t-on, comme en France, enfin écouter les femmes ?